L’expérience de jeu d’une soixantenaire à la manette de Journey
- Premiers constats lors de la première session de jeu
- Le play de l’intéraction liée à la proximité
- Principales difficultés rencontrées
- Mme Michu a particulièrement apprécié l’univers du jeu
- Mme Michu a compris une grande partie des règles du jeu suite à la première session
- Flower pour apprendre le sixaxis
- Seconde session de jeu : une expérience toute autre
- plus Aucune difficulté particulière lors du niveau enneigé
- des fonctionnalités toujours inconnues
- DE NOUVEAUX CHALLENGES : INTERAGIR AVEC AUTRUI
- Conclusion sur l’expérience d’une soixantenaire aux manettes de Journey
Journey est un jeu contemplatif, avec un minimum d’action, un gameplay profond et complexe, qui pour autant ne pose pas de contrainte de réactivité forte ou de condition de défaite punitive. Un jeu parfait à faire tester à Mme Michu, 67 ans, gameuse affirmée.
Découvrez la première expérience de jeu de cette sexagénaire, découvrant pour la première fois l’univers désertique de Genova Chen.
Chaque fois que Mme Michu passe à la maison, je lui montre un jeu susceptible de lui plaire. Mme Michu a 65 ans. Mme Michu adore les jeux vidéos. Elle a notamment fini tous les jeux de feu White Birds Studios, des Lucas Art et, son préféré, the Longuest Journey. Elle refuse pourtant que je lui prête des jeux, car elle “ne ferait plus rien d’autre”. Elle passe donc ses journées à jouer à solitaire au lieu de jeux dignes de ce nom.
Il y a trois mois de cela, je lui avais proposé d’essayer Journey : un jeu sans pression temporelle, de découverte, auquel n’importe quel débutant peut accéder et suffisamment poétique pour plaire. Elle a préféré regarder un autre joueur aux commandes. Mme Michu a peur de la nouveauté dans les jeux vidéos, de trop de difficulté, de la manette de jeu qu’elle ne maitrise pas, de se retrouver dans un jeu d’action hors de son contrôle et de sa portée.
Cette fois ci, c’est elle qui demande à l’essayer. Nous avons fait deux sessions de jeu, à un jour d’intervalle. Entre les deux, nous avons débriefé et laissé passer un jour en faisant d’autres activités.
Brève phase d’inquiétude au lancement : “Où est le bouton start?”, “Qu’est ce que je dois faire ?”. Je lui indique d’essayer les touches, la rassurant sur le fait que rien ne peux lui arriver.
Premiers constats lors de la première session de jeu
Une prise en main rapide des déplacements
Mme Michu a pris le jeu en main très rapidement. Elle maitrise très rapidement le déplacement, et avance au hasard, comprend que le vent l’empêche d’aller dans la bonne direction, et progresse à travers le premier niveau. Les éléments colorés, brillants et en mouvement l’attirent naturellement vers les symboles et la suite du niveau. Elle a toutefois réalisé le parcours court, c’est à dire qu’elle a été guidée directement jusqu’aux niveaux enneigés.
Un gameplay de déplacement contre le vent apprécié
Mme Michu, qui n’a pourtant jamais rencontré ce genre de gameplay au préalable, a très rapidement compris le fonctionnement des passages venteux. Entre deux rafales, il faut avancer puis se mettre à l’abri pour ne pas être repoussé. C’est ce qu’elle ferait elle-même en vrai, dit-elle. Elle a traversé à six reprises des zones venteuses dans lesquelles elle devait s’abriter. Il n’y en a pas tant me direz-vous, toutefois elle est retombée plusieurs fois au début du niveau, par inattention parfois, en conséquence d’un saut raté souvent.
Lors de sa première traversée, elle a été repoussée deux fois par le vent avant de comprendre qu’elle devait s’abriter, et a compris les signes avant-coureurs d’une rafale dès le début de la seconde traversée, si bien qu’elle commentait spontanément, toute fière, ses anticipations lors des traversées suivantes.
A partir de la seconde traversée, si elle était repoussée à de rares occasions par le vent, c’est qu’elle était distraite par l’interaction avec un élément de décors : les tissus congelés sur son trajet.
Le play de l’intéraction liée à la proximité
Sans comprendre pourquoi au début, Mme Michu a très vite repéré l’interaction avec les créatures de tissus : attirée par le mouvement, la couleur, elle a découvert dans le décors de neige que les tissus gelés s’animaient à son contact, et que son personnage brillait.
A 37 reprises, elle s’est arrêtée pour se frotter aux rubans rouges, interprétant rapidement la lumière sur son personnage comme un rechargement de son énergie. Dans 22 cas, elle prenait garde à toucher chacun des (généralement trois) rubans dépassant de la neige. Dans 15 cas, elle s’amusait à marcher dessus jusqu’à les faire disparaitre sous la neige. Même après qu’elle ait compris que les long rubans lui permettaient de monter en volant le long du tissus, elle continuait à se frotter aux petits sans comprendre leur utilité pour le saut.
Principales difficultés rencontrées
Malgré l’attitude de jeu vis à vis de l’expérience, se donnant ses propres buts et règles, Mme Michu a toutefois rencontré quelques difficultés.
- La première source de difficulté, dont elle n’avait pas conscience, provenait du contrôle de la caméra par le Sixaxis. En effet, elle avait elle-même trouvé dans un premier temps le contrôle de la caméra avec le stick droit seulement. Le fonctionnement du sixaxis lui a été expliqué à trois reprises, ce qui ne lui évitait pas de faire des “erreurs” : bouger la caméra involontairement lors de sauts…
- Le contrôle précis de la caméra lui demandait une attention complète qui l’empêchait de faire efficacement autre chose en même temps. A 15 reprises, elle s’arrêtait lorsqu’elle n’arrivait pas à atteindre sa cible en saut ou devait repérer son objectif. Elle déplaçait alors la caméra avec le stick pour faire face à sa destination avant de reprendre ses déplacements. A trois reprises, elle a tenté de le faire avec le Sixaxis, sans succès, en faisant des gestes exagérés largement au dessus de sa tête, malgré les explications visuelles claires.
- De façon globale, les deux points sur lesquels Mme Michu a bloqué le plus longtemps demandaient un maintien prolongé sur le saut dans un cas, et sur le chant dans l’autre. Le saut a été résolu grâce à l’imitation d’un autre joueur; le chant a fonctionné avec trois appuis successifs, après avoir forcé Mme Michu à re-traverser le niveau depuis le début à trois reprises.
- Le point de frustration principal était cet apprentissage du saut prolongé. Mme Michu, arrivant dans la grande zone enneigée emplie de grands tissus, a tourné en rond pendant plus de 20 minutes avant de rencontrer successivement deux autres joueurs, qu’elle a su imiter très rapidement. L’apprentissage par imitation et l’interaction entre les joueurs a été très efficace pour l’aider à surmonter ce challenge. Il est toutefois arrivé très tard, à un stade de frustration très proche de l’abandon.
Globalement, excepté cette dernière, les difficultés rencontrées ont été bien vécues et n’ont pas créé de frustration ou de sentiments négatifs durables.
Mme Michu a particulièrement apprécié l’univers du jeu
Elle a souligné la beauté des décors et des personnages, la direction artistique. La durée de vie courte du jeu l’a agréablement surprise, ravie d’avoir fini en si peu de temps.
La séquence durant laquelle elle a été bloquée le plus longtemps, ne comprenant pas qu’elle pouvait monter le long des tissus verticaux l’a particulièrement marquée. C’est à la fois la séquence qu’elle a considéré le plus difficile à comprendre, et la fonctionnalité qu’elle a trouvé le plus pratique, une fois qu’elle a vu faire un autre joueur : monter le long des tapis lui a semblé très simple une fois compris (malgré de nombreux échecs).
Alors qu’elle a ignoré la majorité des autres joueurs, elle a trouvé leur présence comme étant ce qui l’a le plus aidé à progresser, en dehors des conseils occasionnels que je lui ai donné.
A l’inverse, elle a déclaré aimer le moins le fait de glisser sur le sable, car elle s’est alors sentie sans prise sur la situation, sans contrôle. Ce qui l’a le plus gêné était de devoir garder la manette droite pour que la caméra reste dans la position qu’elle voulait.
Mme Michu a compris une grande partie des règles du jeu suite à la première session
Lorsque je lui ai demandé de m’expliquer les règles du jeu, voici ce qu’elle m’a répondu spontanément :
- Il faut avancer vers la lumière
- Il faut se mettre à l’abri quand il y a de la tempête
- Les petits tapis donnent de la lumière
- Les longs tapis permettent de sauter le long du tapis et voler encore un peu après
- Il n’est pas toujours possible de sauter. Si ce n’est pas le bon chemin, le personnage ne saute pas, mais on peut contourner l’obstacle
- On rencontre des stèles et d’autres joueurs
- Il y a des Léviathans (dragons). L’un d’eux ma renversé car je voulais y aller, mais je ne sais pas quoi faire avec.
- Il y a des tickets qui permettent de voler. Il faut être proche pour qu’ils descendent sur l’avatar et on peut voler jusqu’à ce que ce soit épuisé.
A la fin de la partie, elle a accepté de rejouer le lendemain, en apprenant qu’elle n’avait pas vu tous les niveaux. Entre les deux, je lui ai proposé d’essayer Flower et Flow. En effet, le contrôle de ces jeux est largement basé sur l’utilisation du Sixaxis pour contrôler la caméra et les déplacements. J’espérais que cela aiderait à réduire les difficultés liées au peu de familiarité de Mme Michu avec ce mode d’interaction. Si Flower et Flow l’ont rapidement lassés, l’apprentissage sur le Sixaxis a bien fonctionné et s’est vu lors de la seconde session de jeu.
Flower pour apprendre le sixaxis
Dans cette seconde partie, Mme Michu a joué à Flower et s’est familiarisée avec l’utilisation du Sixaxis. Sa seconde session de jeu sur Journey se déroule de façon très différente de la première.
Seconde session de jeu : une expérience toute autre
Utilisation et maitrise du Sixaxis pour contrôler la caméra
Suite à une heure de jeu sur le premier niveau de Flower et 30 minutes d’essai de Flow, Mme Michu a eu l’occasion de se familiariser avec le fonctionnement du sixaxis de la manette PS3. Lors de sa seconde partie, cela s’est traduit par une utilisation exclusive du sixaxis pour contrôler la caméra – et ce avec succès.
S’ORIENTER EN MOUVEMENT RESTE DIFFICILE
Le seul moment où la caméra a posé une difficulté lors de la seconde partie est lorsqu’elle était placée en vue de côté, lorsque dans la neige, il faut monter un escalier entre deux rafales avec un timing très serré. Mme Michu, ne pouvant replacer la caméra dans son dos a eu du mal à le monter.
Lors de cette seconde partie, Mme Michu avait toujours du mal à gérer en même temps les mouvements et la caméra. Elle s’arrêtait néanmoins moins souvent pour s’orienter : 10 fois seulement notées, contre 20 lors de la première session, alors qu’elle n’avait alors traversé que 3 des niveaux.
Saut long et rechargement par les cartes : utile et amusant
Lors de sa seconde partie, Mme Michu a clairement profité des interactions avec les cartes, qu’elle a comprise juste à la fin de sa première partie. Chaque fois qu’elle rencontrait des cartes, elle interagissait avec pour les faire venir sur elle, vidant sa capacité de saut, juste pour les faire réagir.
Ce comportement, bien qu’inutile pour le jeu, l’amusait beaucoup. Elle a ainsi attiré 8 fois sur elle le premier paquet de cartes lors du tutoriel, puis encore 5 fois sur chacun des ensembles de cartes suivants.
De même, lorsqu’elle est montée sur la tour et qu’elle a libéré le cartes, elle s’est fait porter par elles deux fois, la première fois en suivant le tutoriel, la seconde pour le fun, avant de finalement traverser l’espace vide en volant sans leur aide.
Rencontre avec les léviathans
Lors de cette seconde partie, il n’y fallu qu’une rencontre avec un Léviathan pour que Mme Michu comprenne qu’elle devait éviter la lumière. Elle n’a toutefois pas réussi à le faire lorsqu’elle y a été confrontée de nouveau. Le niveau de difficulté était ici particulièrement élevé de son point de vue. Elle a involontairement évité deux faisceaux, mais a été touchée deux fois sur trois alors qu’elle tentait d’éviter la lumière.
plus Aucune difficulté particulière lors du niveau enneigé
Lorsqu’elle est finalement arrivée aux niveaux enneigés, Mme Michu n’a eu aucun mal à progresser, que ce soit contre le vent, pour escalader les longs tapis verticaux, ou pour passer le pont avec un tapis, bien que ce soit parfois par des moyens détournés.
DES ERREURS D’INPUT ENTRE SAUT ET CHANT
La principale erreur qu’a fait Mme Michu lors de cette seconde partie de Journey étaient des confusions de touches : elle a utilisé l’action chant en lieu et place de saut à de nombreuses reprises, ce qui a rendu particulièrement difficile pour elle l’ascension de la tour lumineuse, malgré la présence d’un joueur en robe blanche qui l’accompagnait et l’attendait avec une grande patience.
Malgré cette même erreur d’input, elle a pourtant réussi à passer du premier coup le pont enneigé où elle était tombée trois fois lors de sa première session de jeu.
des fonctionnalités toujours inconnues
Ayant terminé le jeu à deux reprises, Mme Michu n’a toutefois toujours pas compris de nombreuses fonctionnalités du jeu, et en particulier l’activation des symboles pour “faire grandir son écharpe”, ni les gravures pour débloquer des éléments d’histoire.
DE NOUVEAUX CHALLENGES : INTERAGIR AVEC AUTRUI
Cette seconde session a surtout été l’occasion pour Mme Michu de découvrir les interactions avec les autres joueurs. Accompagnée par des joueurs en robe blanche sur plusieurs niveaux, elle les suivait et jouait avec eux, sans toutefois comprendre ce qu’ils attendaient d’elle et sans avoir le réflexe de “répondre” à leur chant.
Conclusion sur l’expérience d’une soixantenaire aux manettes de Journey
Suite à ces deux sessions de jeu, voici les principaux résultats que nous pouvons retenir de l’expérience de jeu de Mme Michu, gameuse soixantenaire :
- Globalement, malgré sa maladresse et les échecs répétés mais finalement surmontés pour prendre en main le jeu, Mme Michu a vécu deux expériences riches et plaisantes en complétant Journey. Le rythme et le niveau de difficulté du gameplay lui sont bien adaptés. Les éléments de décors et effets de caméra sont suffisamment bien placés pour faire comprendre intuitivement le chemin à suivre, en suivant des éléments saillants.
- Mme Michu est passée à côté de nombreuses fonctionnalités, toutefois elle ne se rend pas compte des éléments dont elle passe à côté, et elle a encore de nouvelles choses à découvrir susceptibles de renouveler son intérêt pour le jeu.
- Mme Michu éprouve des difficultés persistantes à manipuler en même temps le personnage et la caméra. Les sauts précis sont pour elle un challenge important, et restent un des facteurs qui pourraient potentiellement nuire à son expérience de jeu.
- La difficulté liée à l’orientation de ses déplacements était accentuée lors de la première session de jeu par le fait que la caméra soit contrôlée par le stick et par le sixaxis, qu’elle ne maitrise pas. Elle devait faire un effort à la fois pour en comprendre l’effet et pour en tenir compte. Après 1h30 sur des jeux dont le sixaxis est le contrôle principal (flower, flow), elle s’en est servie beaucoup plus naturellement lors de sa seconde session de Journey, n’utilisant plus le stick, et ne râlant plus du tout après la caméra.
- Dans Journey, des tutoriels apparaissent ponctuellement aux moments où le joueur semble bloqué. Le joueur a également la possibilité d’apprendre des autres joueurs qu’il croise, et qui selon leur niveau d’expérience se comportent activement comme des “mentors”. La combinaison de ces deux éléments a fonctionné à merveille dans le cas de Mme Michu qui a tantôt suivi un didacticiel, tantôt été débloquée en imitant un autre joueur ou en suivant son guidage. Reste à savoir si Mme Michu voudra refaire une partie dans 3 mois, lors de notre prochaine rencontre.
Et vous, avez-vous déjà observé un senior jouer à un jeu vidéo ? Qu’est ce qui vous a le plus surpris ? Avez-vous au contraire vu des expériences d’utilisation de Journey totalement différentes ou au contraire très similaires ?
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